Introduction Le Désert
1) Amorce
Le poème « Le Désert » de Leconte de Lisle, paru en 1862, représente une variante assez intéressante de la tradition orientaliste en littérature. Car si l’œuvre inaugurale de ce courant, Les Orientales de Victor Hugo, s’intéressait surtout à l’Orient méditerranéen, c’est ici à une plongée dans une terre plus reculée et aussi plus hostile, le désert nord-africain, que nous invite l’auteur des Poèmes Barbares.
2) Idées directrices
De prime abord, « Le Désert » se donne à lire comme un récit de songe : un bédouin harassé s’endort parmi ses bêtes, dans les dunes, et rêve. Mais, alors que le poète semble, conformément à l’habitude orientaliste et même à une certaine pente naturelle à l’esprit humain, prêter à ce bédouin des pensées réconfortantes, aux antipodes de sa solitude actuelle et de l’hostilité du milieu dans lequel il évolue, c’est vers un tout autre onirisme, plus noir et plus trouble que nous oriente Leconte de Lisle : les rêves du bédouin sont épiques, tourmentés et érotisés. Le réveil, de ce fait n’en est que plus brutal et désenchanté, sans complaisance aucune.
3) Problématique
Nous nous demanderons donc dans quelle mesure, loin de se complaire dans la description rassurante de rêves agréables, tous aussi topiques les uns que les autres, c’est bien plutôt à une plongée sans concession dans un sommeil tourmenté et sombre que nous invite le poète, afin de montrer le désert, la nuit et le rêve comme autant d’espaces traversés par le fantasme.
4) Annonce du plan
Il est effectivement loisible de constater, tout d’abord, que la première partie du poème, sans passer sous silence l’hostilité du désert, nous présente en faux-semblant tout un univers onirique rassurant, marqué par les isotopies de la lumière et du réconfort. Mais, c’est pour mieux déjouer nos attentes de lecteur. Aussi, tenterons-nous de montrer ensuite que le poème, dont les deux parties sont clairement discordantes, procède bien plutôt