Kant - le respect
Les onze premiers paragraphes, ayant rappelé le sens de la distinction de la vertu et du bonheur, la suite répond à l’objection de Garve : ce vouloir formel, cette universalité purement rationnelle, est hors de portée des hommes ; il manque ici un mobile (un principe de détermination sensible de la volonté).
Si en théorie – dans sa tête – un homme subtil peut comprendre
Kant, en pratique – dans son cœur -, nul n’est mobilisé par la représentation du devoir.– 15 –
Garve se trompe, car cette représentation rationnelle de la loi en tant que loi fait naître en l’homme le sentiment du respect, qui est la manière dont l’homme éprouve, en tant qu’être sensible, sa nature d’être raisonnable. Ce sentiment n’ayant pas pour principe la sensibilité (ne dérivant pas de notre désir de bonheur), Kant l’appelle sentiment moral. Il est, comme effet de la raison sur la sensibilité, le mobile moral. Agir en effet par respect pour la loi morale, c’est faire son devoir pour lui-même, de façon désintéressée. (De la même manière la seule Idée de l’universalité pratique (morale), dans les choses politiques, l’Idée de Justice, soulève l’enthousiasme des peuples, comme on vit en 1789, et la seconde partie montrera que cette justice n’est pas irréalisable.)
L’erreur de Garve et des psychologues est de considérer que l’homme ne peut être mu que par le souci de son bonheur : il est commun de mépriser l’humanité, de la croire sourde à la raison. Certes, il nous faut toujours un mobile, car nous sommes des êtres sensibles. Mais prendre le respect, mobile de l’homme vertueux, pour un sentiment du même ordre que les autres mobiles, liés au souci du bien-être, c’est une illusion.
L’exemple du dépôt est là pour montrer que ce sentiment naît en chacun s’il est mis devant la rationalité et l’universalité pratiques, que surtout ce mobile est d’autant plus fort que la loi s’y révèle avec plus de pureté, bref que la forme est ce