La classe de danse, degas
I Degas peintre des danseuses :
« Peintre des danseuses » : ainsi Manet définit Degas dans une lettre adressée à Fantin-Latour en 1868, en anticipant d’une dizaine d’années le jugement des critiques ; tel est encore connu aujourd’hui Degas, en raison du grand nombre d’œuvres consacrées à ce sujet entre 1860 et jusqu’aux années 1890. Degas ne partage pourtant pas, à l’égard des danseuses, l’admiration intéressée de la plupart des habitués de l’Opéra, notamment des riches abonnés. Si le peintre insiste auprès de l’administration du théâtre pour obtenir l’abonnement annuel à trois soirées hebdomadaires en partageant les frais – et la place – avec des amis et se réservant le très convoité droit d’accès aux coulisses et au foyer de la danse, ce n’est pas pour des aventures galantes. Degas est fasciné par le monde des danseuses et le représente tel qu’il est, sans tomber dans le voyeurisme ou dans les préjugés de la société de son époque à l’égard d’une profession pourtant digne d’estime comme tout autre métier d’artiste. Ayant la possibilité d’assister aux classes, aux répétitions, aux spectacles et au repos des danseuses et, de plus, invitant souvent des danseuses dans son atelier, Degas connaît bien leurs habitudes et leur milieu de travail, le dur entraînement caché derrière les gestes légers et élégants et les sourires affichés sur la scène. La préférence de Degas pour les sujets féminins dans ses œuvres sur la danse (les seuls hommes représentés sont les maîtres de ballet), reflète d’ailleurs une tendance de l’époque. La danse masculine touche alors son plus bas niveau de popularité : les hommes ne remportent plus la faveur du public. Degas est d’ailleurs caricaturé en danseur.
L’engouement pour les danseuses est tel qu’on leur confie souvent même les rôles masculins qu’elles dansent en travesti, dans des costumes qui permettent de mieux voir leurs jambes. C’est d’ailleurs à cette époque que bat son plein le cancan, genre populaire dont le succès repose