tchenLes divers personnages du roman incarnent chacun une attitude face à la vie et à l’histoire. Kyo, c’est l’engagement héroïque. Pour ce métis au visage de samouraï, qui est le chef de la Révolution, comme le fut jadis, dans la réalité, Zhou En-Laï, « les idées ne devaient pas être pensées, mais vécues. » « Sa vie avait un sens : donner aux hommes leur dignité. » Il aime une femme, May, active et indépendante ; il aime aussi son père. Mais il n’aime pas moins ce peuple pour lequel il se bat, et pour lequel il donne sa vie. Tchen, compagnon de Kyo, incarne la tentation du terrorisme. Dans son engagement politique, il découvre une pulsion fantasmatique : « le terrorisme devenait pour lui une fascination ». Ce mysticisme obscur de la destruction, ce désir d’« une extase vers... vers le bas » le pousse à se lancer en kamikaze dans un attentat-suicide, du reste avorté, contre Chang-Kaï-Shek. Katow, c’est l’héroïsme dans l’humilité. Cet homme modeste d’origine russe a déjà connu bien des luttes, et il en a souvent souffert. Avare de mots, il est la générosité même. Il va jusqu’à offrir à d’autres la dose de cyanure qui lui aurait permis d’éviter la mort atroce que lui réservent les gardiens. Il est peut-être le plus humain de tous les héros du roman. Face à eux se dresse Ferral, la volonté de puissance. Homme dur, comme le suggère son nom, il est le président du consortium franco-asiatique, et en tant que tel, il représente les puissances d’argent, qui s’opposent bien sûr à la Révolution. Il veut dominer, en affaires, en politique comme en amour. Mais son style d’aventurier conquérant et de hussard de l’industrie le perdra auprès des milieux français, dont le soutien financier lui serait nécessaire. Le baron Clappique est l’homme de l’illusion. Fantasque, inconsistant, « le baron de Clappique n’existe pas », comme il le dit lui-même. Anti-héros bouffon et mythomane, il laisse filer entre ses mains de brouillard le temps qui