La fin justifie-t-elle les moyens
A première vue la question est embarrassante dans la mesure où elle semble paradoxale : il semble en effet évident, parce que nécessaire, que : qui, comme on dit, non sans raison, veut la fin, veut les moyens. Ou encore qu’il faille être conséquent. L’évidence, ici, est de celle que l’on peut sévèrement opposer au discours de « la belle âme » arguant, pour absoudre sa faute, de la pureté de ses intentions. Ou encore au discours des grands de ce monde, habitués à être servis, et vivants, de ce fait, dans une sorte de paradis idéal où tout le mal et la peine sont relégués en sous sol et réservés aux esclaves obscurs :
« -Ah !cela coûtait donc si cher ? » (Par exemple : la culture demandait en fait tant de barbarie ? Métropolis) « Je ne savais pas » ou « si j’avais su ! ».
Mais, à y regarder de plus près, si le juge sévère rétorque :
-« Allons assez d’enfantillages et de mauvaise foi, qui veut la fin veut également les moyens, vous saviez très bien ce que coûtaient vos folies », il dit exactement le contraire de : la fin justifie les moyens.
Nous proposons de partir de ce phénomène sémantique très curieux qui confère des sens opposés à deux formulations pourtant très similaires, ce qui laisse soupçonner quelque trafic dans le sens des mots, quelque détournement majeur, quelque brigandage langagier, lesquels sont toujours annonciateurs des pires dominations et des pires tyrannies.
Qu’est ce qu’on veut donc nous faire croire en disant que la fin justifie les moyens ? Et en disant le contraire ?
Justifier c’est faire (facio latin) juste, rendre juste ; donc le problème ici est clairement : comment quelque chose devient-il juste ? Mais cette transformation est-elle réelle ou apparente ? Peut-être donc plutôt : comment fait-on passer pour juste ce qui ne l’est pas, est injuste.
On voit donc se dessiner sous nos yeux une opération de prestidigitation qui consiste à détourner le regard de celui qui voit l’injustice, et