La Fontaine "Le pouvoir des Fables"
En quoi la fable de La Fontaine propose-t-elle une argumentation efficace ? Comment met-elle en œuvre une esthétique propre au XVIIème siècle ?
[Introduction]
Les chemins détournés sont parfois les meilleurs ; et quand ils ne le seraient pas, ils n’en présenteraient pas moins d’avantages. C’est ce que La Fontaine, renouvelant au
XVIIème siècle le genre antique de la fable en mettant en vers celles héritées d’Esope et de
Phèdre, avait bien compris. Son projet, qu’il adresse au Dauphin, est porteur d’une ambition pédagogique claire. Par l’entremise d’une petite histoire, illustration plaisante et divertissante, la fable favorise l’accès, dès le plus jeune âge, et quel que soit le public, aux idées les plus subtiles et aux situations les plus graves. C’est cette capacité du genre de l’apologue que démontre La Fontaine dans « Le Pouvoir des Fables », dont le seul titre annonce d’emblée le rapport de force typique de l’argumentation. A travers la mise en scène d’un personnage d’Orateur qui, face à l’échec de sa harangue, entreprend d’appeler les
Athéniens à la guerre par le récit d’une fable, l’auteur souligne la double efficacité du genre auquel il s’adonne qui, selon l’esthétique en vigueur à l’époque classique, sait parfaitement
« joindre l’utile à l’agréable ». C’est de là que la fable tirerait sa pertinence argumentative.
Nous entreprendrons de démontrer, à travers l’étude du « Pouvoir des fables », en quoi La
Fontaine défend habilement son point de vue – et son art. Si ce dernier s’appuie avant tout sur un art du conte, c’est pour mieux assurer l’efficacité de sa stratégie argumentative, qui se développe d’autant mieux qu’elle met en œuvre les canons esthétiques en vigueur, aptes à sensibiliser les lecteurs contemporains.
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[Première partie : l’art du conte]
La Fontaine est sans conteste un admirable conteur. Ses fables présentent de petites histoires délectables déroulant