La justice
Introduction
Que la justice puisse devenir inégalitaire présuppose qu'en son concept la justice est égalitaire. Or ce postulat n'a rien d'évident. Le plus souvent on assimile la justice à l'égalité, on la fige par cette définition. Or ici la justice s'entend en un sens dynamique, puisque l'on admet qu'elle engendre l'égalité entre les personnes.
La question nous invite à aborder la justice sous un angle original. L'interrogation ne porte pas sur l'essence de la justice, sur ce qu'est la justice en tant que telle. Elle suggère d'envisager la justice plutôt par les effets qu'elle produit. Rien ne sert donc de raisonner sur le concept abstrait de justice. Il faut s'intéresser à la justice telle qu'elle s'exerce. En remontant de l'effet à la cause, nous pourrons obtenir peut-être de savoir ce qui la spécifie. Faire de la justice le sujet d'un processus égalitaire, revient à la situer d'emblée dans le cadre de la pensée politique. En dehors de la justice divine, qui ne vaut que pour les croyants, il reste la justice des hommes, qui s'exerce matériellement par l'intermédiaire du pouvoir politique.
Admettons - ce qu'il faudra discuter - que la justice vise l'égalité entre les hommes. Comment deviendra-t-elle inégalitaire ? Comment comprendre que la justice puisse s'écarter d'elle-même, et se renverser en son contraire ? De deux choses l'une :
- Si la justice crée des inégalités, elle produit donc des effets contraires à sa nature, ce qui n'a pas de sens, sauf à entendre qu'il y a usurpation et qu'en définitive l'injustice s'est parée indûment des vêtements de la justice. Cela n'a plus alors aucune signification de se demander si la justice peut devenir inégalitaire. Que la justice dégénère et se transforme en injustice, voilà les nouveaux termes de la question. La justice peut-elle virer à l'injustice et se corrompre elle-même ?
- On peut concevoir aussi bien que la justice génère des inégalités sans pour autant qu'elle