La leçon d'hypocrisie et d'humilité - rutebeuf
INTRODUCTION
L'extrait que nous allons étudier s'intitule La Leçon d'hypocrisie et d'humilité (titre original en Ancien Français : La Lections d'ypocrisie et d'umilitei) de Rutebeuf. Il fut composé à l'automne 1261, en octobre d'après les spécialistes. Nous nous intéresserons à ses 58 premiers vers. Il s'agit d'un dit en vers dans lequel l'auteur-narrateur raconte comment, un soir où il était saoul, il fit un rêve et rencontra un homme de bien qui lui offrit le gîte et le couvert. Le ton est plutôt gai, rieur, et le registre romanesque.
LECTURE
Au fur et à mesure de la lecture, on est frappé par l’auto-dérision dans le ton de l'auteur. On ne peut être certain de ses objectifs, cependant, lors d'une première lecture. Si, à première vue, il semble vouloir rapporter de mémoire un fait qui, visiblement, l'étonna lui-même, on s'aperçoit après relecture qu'il en va en vérité tout autrement ; l'auteur sait où il va, son poème est construit, sa démarche ne consiste pas en la simple narration d'un épisode amusant et surprenant de ses nuits de sommeil enivré. Nous étudierons donc en quoi ce dit est une leçon à strates multiples. Nous commenterons d'abord la pluralité du caractère de ce texte. Ensuite nous relèverons en quoi Rutebeuf manipule son lecteur ou auditeur. Enfin, nous verrons que Rutebeuf joue avec sa propre personne dans une mise en scène personnelle.
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PARTIE I
Pour commencer, l'extrait est représentatif de la pluralité des genres et des registres dans l'ensemble du poème.
A. Un dit au caractère événementiel
– définition du dit : poème narratif à la première personne, destiné à être récité ; « dramatisation concrète du moi », selon Michel Zink ; « discours qui met en scène un je » selon Jacqueline Cerquiglini ; le poète cherche a rendre impossible le processus d’appropriation par le public en imposant sa présence (se nomme directement au vers 45).
– circonstance particulière de la vie du poète