la loi et la liberté , par Rousseau
La loi et la liberté
On a beau vouloir confondre l’indépendance et la liberté. Ces deux choses sont différentes que même elles s’excluent mutuellement. Quand chacun fait ce qu’il lui plait, on fait souvent ce qui déplait à l’autres, et cela ne s’appelle pas n état libre. La liberté consiste moins à faire sa volonté qu’à n’être pas soumis à celle d’autrui ; elle consiste encore à ne pas soumettre la volonté d’autrui à la nôtre. Quiconque est maitre ne peut être libre, et régner c’est obéir. Je ne connais de volonté vraiment libre que celle que celle à laquelle nul n’a droit d’opposer de la résistance ; dans la liberté commune nul n’a droit de faire ce que la liberté d’un autre lui interdit, et la vraie liberté n’est jamais destructive d’elle-même. Ainsi la liberté sans justice est une véritable contradiction ; car comme qu’on s’y prenne tout gêne dans l’exécution d’une volonté désordonnée.
Il n’y a donc point de liberté sans lois, ni où quelqu’un est au-dessus des lois : dans l’état même de nature l’homme n’est libre qu’à la faveur de la loi naturelle qui commande à tous. Un peuple libre obéit, mais il ne sert pas ; il a des chefs et non pas des maitres ; il obéit aux lois, mais il n’obéit qu’aux lois et c’est par la force des lois qu’il n’obéit pas aux hommes. Toutes les barrières qu’on donne dans les républiques au pouvoir des magistrats ne sont établies que pour garantir de leurs atteintes l’enceinte sacrée des lois : ils en sont les ministres non les arbitres, ils doivent les garder non les enfreindre. Un peuple est libre, quelque forme qu’ait son gouvernement, quand dans celui qui le gouverne il ne voit point l’homme, mais l’organe de la loi. En un mot, la liberté suit toujours le sort des lois, elle règne ou périt avec elles ; je ne sache rien de plus certain.
J-J Rousseau, Lettre écrites de la montagne,
Huitième lettre, 1764 Questions :
Dégager la thèse du texte et montrer comment elle est établie . La loi est-elle