La machine infernale analyse
Le sens du titre L’expression de « machine infernale » n’est pas une invention de Cocteau. On l’utilisait déjà aux XVIIIe et XIXe siècles. Au sens propre, une « machine infernale » était alors un engin explosif fabriqué pour commettre un attentat. C’est ainsi qu’en histoire, on parle de la « machine infernale » du républicain Fieschi qui tenta de tuer le roi Louis-Philippe, le 28 juillet 1835. Au sens figuré, une « machine infernale » est une combinaison de moyens odieux pour perdre quelqu’un, qu’il s’agisse de ruiner sa réputation ou sa carrière. C’est cette dernière signification que l’expression prend sous la plume de Cocteau. La fatalité fonctionne comme une « machine » dans la mesure où son mécanisme est implacable ; et elle est « infernale » parce qu’elle est d’une cruauté préméditée et absolue. La terrible histoire d’Œdipe est celle d’un piège tendu de longue date, sans échappatoire possible. Le caractère « infernale » de l’action doit s’entendre de trois façons : il provient d’une machination des dieux des enfers ; il est d’une horreur totale ; et il l’est d’autant plus que la malédiction divine se révèle gratuite.
Le tragique Le tragique de cette pièce ne se réduit pas à l’atrocité de l’action. Une catastrophe ou des crimes aussi horribles que le parricide et l’inceste peuvent être tragique ; ils peuvent aussi ne pas l’être. Tout dépend du contexte dans lequel ils se produisent et de la charge émotive qu’ils recèlent. Chez Cocteau, le tragique naît de l’absolue fatalité qui pèse sur les personnages. Comme si eux-mêmes acceptaient à leur insu de collaborer avec la fatalité. De là ressort une interrogation sur les liens possibles du destin et de la liberté. Cocteau ne se contente pas de mettre en scène le tragique : il suggère son dépassement. Le poids de la fatalité et de la force des désirs inconscients n’empêchent pas Œdipe de se sentir libre, à défaut de l’être réellement. Pour le spectateur, c’est