La mondialisation accentue-t-elle les inégalités
Les Echos n° 20015 du 01 Octobre 2007 • page 17
La question des inégalités est l'une des plus cruciales du débat public sur la mondialisation. Si on laisse de côté les questions de mesure des inégalités, fortement débattues chez les économistes et aboutissant forcément à des conclusions différentes, on peut globalement formuler quelques observations.
Les inégalités entre pays (les 10 % les plus riches et les 10 % les plus pauvres) se sont indiscutablement accrues. Si on prend en considération non pas les pays mais les revenus des ménages, on aboutit au même constat. La mondialisation accentue les inégalités. Mais cela la délégitime-t-elle pour autant ? Rien n'est moins sûr. Tout d'abord parce qu'il y a inégalités et inégalités. Si, par exemple, on pondère le poids des pays par rapport à leur population c'est-à-dire que l'on tient compte du fait que le Ghana et la Chine n'ont pas la même population, on constate une sensible régression des inégalités et cela essentiellement en raison de la croissance chinoise et indienne. De fait, la croissance des pays en développement croît depuis 2003 trois fois plus vite que celle des pays du G7. On est très loin de la caricature d'un monde s'appauvrissant sous les yeux d'une minorité de privilégiés indécents.
C'est là où il faut préciser un point essentiel. Ce n'est pas parce que les inégalités s'accroissent qu'un pays régresse. C'est même souvent le contraire. L'idée selon laquelle l'inégalité se traduirait par un enrichissement des riches et un appauvrissement des pauvres est le plus souvent une contrevérité. L'inégalité signifie souvent que l'enrichissement des plus riches s'accroît plus vite que celui des plus pauvres. Cela est probablement injuste, mais cela n'a rigoureusement rien à voir avec une sorte de paupérisation. C'est d'ailleurs pour cela que l'accroissement des inégalités n'est nullement contradictoire avec un recul de la pauvreté absolue. On peut avoir