La philosophie et le rire

7533 mots 31 pages
Nietzsche nous dit, à la fin de Par delà le bien et le mal : « J’irais jusqu’à risquer un classement des philosophes suivant le rang de leur rire. » Nietzsche a une violente aversion pour les philosophes qui, comme il le dit, « ont cherché à donner mauvaise réputation au rire ». Et il juge Thomas Hobbes singulièrement coupable de ce crime, ajoutant qu’on ne saurait attendre d’un Anglais autre chose que l’attitude puritaine de Hobbes. Or il se trouve que l’accusation de Nietzsche repose sur une citation mal interprétée de ce que dit Hobbes sur le rire en philosophie. Cependant, Nietzsche avait sans doute raison de souligner que Hobbes (d’accord en cela avec la plupart des penseurs importants de son époque) considérait comme évident que le rire est un sujet auquel les philosophes doivent s’intéresser sérieusement.
Selon moi, cet intérêt commença à prendre de l’ampleur au cours des premières décennies du XVIe siècle, en particulier chez des humanistes aussi éminents que Castiglione dans son Cortegiano de 1528, Rabelais dans son Pantagruel de 1533, Vivès dans son De anima & vita de 1539, ainsi que dans plusieurs textes d’Érasme. Et puis, à la fin du siècle, pour la première fois depuis l’Antiquité, nous voyons se développer une littérature médicale spécialisée concernant les aspects physiologiques ainsi que psychologiques de ce phénomène. Le pionnier dans ce domaine est Laurent Joubert, médecin de Montpellier, dont le Traité du ris est publié pour la première fois à Paris en 1579. Puis, bientôt après, plusieurs traités comparables commencent à paraître en Italie, dont De risu de Celso Mancini en 1598, De risu de Antonio Lorenzini en 1603, et ainsi de suite.
Il peut sembler surprenant que tant de médecins se soient emparés avec pareil enthousiasme d’un thème essentiellement humaniste (parmi eux, bien entendu, Rabelais) et c’est là une énigme sur laquelle je reviendrai. Mais pour le moment, je veux en rester aux philosophes, et souligner avec quel enthousiasme un si

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