À l’époque de Monet, on n’imagine pas peindre la lumière avec des couleurs vives sans que celles-ci puissent être « rabattues », c’est-à-dire atténuées par des demi-tons intermédiaires et opposées à des couleurs sombres. Ce paysage rompt avec ce que le public a coutume de voir et qui semble être la règle. Dans cette œuvre ne se trouvent ni blanc d’argent ni blanc sali, ni gris ou nuances terreuses et encore moins de noir. Pour obtenir cette sensation d’ensoleillement et de neige cotonneuse, Monet peint sans contraste, en pleine lumière, avec des tons clairs et de multiples taches de couleurs superposées allant des tons froids pour l’ombre – bleu et violet – aux tons chauds pour la lumière – orangé et jaune. Aucune reproduction ne parvient à restituer la subtilité réelle des couleurs de cette œuvre aujourd’hui exposée au musée d’Orsay. Pour en comprendre la virtuosité, le spectateur doit être « actif » car, observé de loin, le tableau apparaît quasiment blanc monochrome. Il faut s’en approcher pour découvrir la virtuosité du travail des blancs que Monet obtient par couches transparentes de couleurs. Le blanc y est décliné en une multitude de nuances et de transparences en fonction des variations de la lumière. Dès que l’on s’en éloigne, l’œil mélange et fait la synthèse des taches juxtaposées pour ne voir que l’image d’une douce ambiance feutrée. Aucune forme n’est dessinée, aucun détail n’est défini, et pourtant le champ, la haie, la barrière, les arbres, la maison et le ciel sont parfaitement identifiables. Mais l’œil du peintre ne s’y attarde pas. Avec une grande simplicité de moyens, Monet choisit de retranscrire l’impression qu’exerce sur nos sens la beauté éphémère de la neige sous le soleil. La matière même des cristaux de neige est rendue palpable grâce aux petites touches nerveuses de peinture épaisse appliquées dans de multiples sens. La composition est construite par bandes horizontales : une large ligne sombre formant la haie divise la composition par le