La puissance subversive de la thèse développée dans le Discours ne s’est jamais démentie. Même s’il serait anachronique de la qualifier d’anarchiste, cette thèse résonne encore aujourd’hui dans la réflexion libertaire sur le principe d’autorité. Le jeune humaniste sarladais recherchait une explication à l’étonnant et tragique succès que connaissent les tyrannies de son époque. S’écartant de la voie traditionnelle, La Boétie porte son attention non sur les tyrans mais sur les sujets privés de leur liberté. Et il pose une question troublante : comment peut-il se faire que « tant d’hommes, tant de bourgs, tant de villes, tant de nations endurent quelquefois un tyran seul, qui n’a de puissance que celle qu’ils lui donnent ? ». Si pour éviter la censure, les exemples sont tirés de l’Antiquité, la réflexion porte bien sur son époque, dans un pays où le poids du pouvoir monarchique se renforce.
L’originalité de la thèse de La Boétie est contenue tout entière dans l’association paradoxale des termes « servitude » et « volontaire ». Il établit ainsi un modèle de la servitude, des causes de son apparition à celles de son maintien qu’il s’agit d’établir ici.
Un point de vue : La Boétie, en énonçant son discours, ne se positionne pas comme maître à penser, ni comme détenteur de la vérité : ceux qui affirment détenir la vérité sont en vérité ceux qui détiennent la maîtrise. Ce qui est vrai, c'est la compréhension singulière qu'on a du texte ; pour accéder à la liberté, il faut n'être ni maître ni esclave. C'est à un relativisme sceptique que le Discours invite à penser; question de point de vue.
Comment un homme arrive-t-il à dominer un peuple