Problématique : dans quelle mesure la pratique religieuse fait-elle l'objet de critiques? I] La critique des superstitionsOn constate la présence d'individus abusés d'une part (A) et d'individus égarés d'autre part (B). A) Les individus abusésLe cas des six pèlerins mangés en salade met en lumière différents enjeux. Déjà peut-être évoqué le lien très fort avec Pantagruel ; dans cette autre œuvre rabelaisienne, Alcofribas avait pour mission d'explorer la bouche du géant. En l'espèce, l'un des pèlerins, le sixième, est confondu avec une limace et son bâton est pris pour une corne. Alors est-il avalé avec d'autant plus de plaisir. On peut voir derrière cet épisode l'image de l'ogre engloutissant les petits enfants comme dans les contes. Seulement, l'issue est repoussée constamment. Et si l'on peut voir derrière le déluge urinal une figure biblique, on peut aussi et surtout y entrevoir des obstacles dressés sur leur route.Mais la vraie critique des superstitions a lieu après ce passage comique. C'est le discours de Lasdaller qui est pointé du doigt. Rabelais raille ce pèlerin qui explique leurs mésaventures à travers les psaumes : « Quand leur colère s'enflamma contre nous, alors les eaux nous auraient submergés » (psaume CXXIV ; ch. XXXIX ; p. 283). Ainsi Lasdaller pense-t-il que l'homme est déterminé dans ses faits et gestes alors que Dieu a laissé l'homme libre. Tout évènement n'est pas prévisible, il est dans l'erreur. Invités au banquet du chapitre XLV, les pèlerins sont vivement repris par Grandgousier qui fustige leurs superstitions : « Oh ! dit Grandgousier, pauvres gens, estimez-vous que la peste vienne de Saint-Sébastien ? » (p. 317). Il accuse également ceux qui sont à l'origine de cette fausse croyance : « La peste ne tue que le corps, mais de tels imposteurs empoisonnent les âmes » (p. 319). Quant à Frère Jean, il rappelle aux pèlerins leurs devoirs vis-à-vis de leur femme tandis que Grandgousier les invite à vivre selon les préceptes de saint Paul qui