la représentation de l'écrivain etde l'écriture dansla poésie de F. Villon
La forme testamentaire des Poésies de François Villon implique la mise en scène du poète par lui-même. Ce recours au « je » poétique n'est pas nouveau au XVe siècle, il s'inscrit dans une tradition qui, depuis deux siècles, exhibe un « moi » présenté comme authentique et personnel. Nous pouvons citer Le Roman de la Rose de Guillaume de Lorris ou Le Jeu de la Feuillée d'Adam de la Halle. Mais le modèle que Villon semble retenir est celui d'Eustache Deschamps et de son Testament par esbatement. Cette forme permet à Villon de créer l'illusion d'une autobiographie, d'insérer son « moi » dans la fiction mais aussi de gagner une liberté d'expression permise par sa situation de mourant car « Qui meurt a ses loix de tout dire » (Testament, vers 728). Les frontières sont délibérément fragilisées par l'auteur entre fiction et réalité et l'oeuvre poétique de François Villon semble bien être le meilleur témoignage sur le poète mais aussi sur l'homme, c'est, selon les mots de Roger Dragonetti « l'expression plus ou moins fictive de la vie réelle du poète ». Cette mise en scène d'un homme rédigeant son testament implique une représentation de l'écrivain et de l'écriture. Nous nous demanderons comment Villon, à travers la fiction testamentaire, les jeux de masques et la parole ironique, construit une image de l'écrivain et de l'écriture. Pour cela, nous analyserons la manière dont l'écrivain se présente et met en scène l'acte d'écrire. Puis nous verrons que l'auteur fragmente la figure de l'écrivain en multipliant les voix et les acteurs même de l'écriture. Enfin nous nous demanderons comment l'auteur crée une écriture en mouvement se libérant parfois même des carcans de la création.
* * * Nous verrons tout d'abord comment François Villon se représente dans son oeuvre, sous les traits d'un testateur au seuil de la mort, et comment il annonce son projet d'écriture. La rédaction d'un