La russie et l
Entretien avec René Cagnat, colonel (en retraite), docteur en sciences politiques, ancien attaché militaire en URSS, Bulgarie, Roumanie, Ouzbékistan et enfin au Kirghizstan*.
Vous parlez de « chaudron » pour décrire les relations entre la Russie et l’Asie centrale. Pourquoi cette métaphore ?
René Cagnat : L’Asie centrale est une région tellement compliquée, à l’image de l’Orient en général, que recourir à une approche classique ne permet pas de la comprendre, d’où la métaphore du chaudron centrasiatique. J’ai choisi le chaudron car il symbolise à la fois l’aspect gastronomique et convivial. Il y a le contenu du chaudron, et autour tous ceux qui s’activent pour animer le feu et concocter la mixture qu’il contient. Ce chaudron centrasiatique renferme divers ingrédients dont notamment les « larmes du diable » et les « larmes d’Allah ». Les « larmes du diable », c’est le nom que l’on donne aux hydrocarbures en Asie centrale. Cette image rend compte de la réalité de cette région aujourd’hui : un énorme gisement de pétrole et de gaz. à ce titre, elle est devenue l’un des grands points de vente d’hydrocarbures dans le monde. Le chaudron centrasiatique contient également d’autres ingrédients en termes de ressources, tels que l’uranium et les métaux rares du Kazakhstan, l’or ouzbek et kirghize, les pierres précieuses du Tadjikistan ou le coton ouzbek qui donnent l’occasion à des mafias de s’organiser, de tirer profit des richesses au détriment du peuple. Voilà toute une manne qui pourrait profiter à l’Asie centrale et souvent lui échappe. Nous retrouvons également dans le chaudron les « larmes d’Allah », nom donné à l’héroïne liquide ainsi qu’à toutes les autres drogues qui l’accompagnent. Les « larmes d’Allah » sont encore plus regrettables que les « larmes du diable ». Elles représentent, ces dernières années, selon le directeur de l’Office de la drogue russe, un chiffre d’affaires de plus de 100