La science politique Braud Philippe
La science politique
PHILIPPE BRAUD
Ancien directeur du département de science politique de la Sorbonne
Professeur émérite des universités à Sciences Po Paris
Onzième édition mise à jour
51e mille
Introduction
La science politique n’est pas née avec Platon, Hobbes ou Rousseau, ces monstres sacrés de la philosophie politique. Entendue strictement, elle est une discipline contemporaine, apparue au début du XXe siècle dans le sillage des grandes sciences sociales.
La démarche du politiste se constitue en effet autour de trois grands repères. Le premier est la séparation aussi rigoureuse que possible entre l’analyse clinique et le jugement de valeur, ce que
Max Weber appelait l’exigence de neutralité axiologique. Le deuxième est le recours à des méthodes et techniques d’investigation, communes d’ailleurs aux sciences sociales, sur la validité desquelles le chercheur doit en permanence s’interroger pour en évaluer les limites. Le troisième est l’ambition de systématisation, c’est-à-dire à la fois la production de concepts autorisant un approfondissement de l’analyse et la formulation de lois tendancielles, voire la construction de modèles qui introduisent une certaine prédictivité.
Cette spécificité de l’analyse savante ne doit pas signifier une quelconque condescendance à l’égard d’autres discours sur le politique : celui du philosophe que préoccupe d’abord la question éthique ou celui de l’acteur engagé, soucieux surtout de justifier son combat. Tous ont une indéniable utilité sociale, notamment du point de vue démocratique. Mais comme chacun obéit à des logiques propres, il est nécessaire de bien séparer les genres pour éviter toute usurpation de légitimité.
Reconnaître la spécificité contemporaine de la science politique ne doit pas conduire à négliger l’importance de ces œuvres majeures de réflexion sur le pouvoir qui jalonnent l’histoire de l’humanité, en Occident depuis les Grecs, mais aussi dans d’autres univers culturels. Encore faut-il