La siciété

335 mots 2 pages
Tout commence à changer de face. Les hommes errants jusqu’ici dans les bois, ayant pris une assiette plus fixe, se rapprochent lentement, se réunissent en diverses troupes, et forment enfin dans chaque contrée une nation particulière, unie de mœurs et de caractères, et par l’influence commune du climat. Un voisinage permanent ne peut manquer d’engendrer enfin quelques liaisons entre diverses familles. De jeunes gens de différents sexes habitent des cabanes voisines, le commerce passager que commande la nature en amène bientôt un autre non moins doux et plus permanent par la fréquentation mutuelle. On s’accoutume à considérer différents objets et à faire des comparaisons ; on acquiert insensiblement des idées de mérite et de beauté qui produisent les sentiments de préférence. A force de se voire, on ne peut plus se passer de se voire encore. Un sentiment tendre et doux s’insinue dans l’âme, et par la moindre opposition devient une fureur impétueuse : la jalousie s’éveille avec l’amour ; la discorde triomphe et la plus douce des passions reçoit des sacrifices du sang humain.
A mesure que les idées et les sentiments se succèdent que l’esprit et le cœur s’exercent, le genre humain continue à s’apprivoiser, les liaisons s’étendent et les liens se resserrent. On s’accoutuma à s’assembler devant les cabanes ou autour d’un grand arbre : le chant et la danse, vrais enfants de l’amour et du loisir, devinrent l’amusement ou plutôt l’occupation des hommes et des femmes oisifs et attroupés. Chacun commença à regarder les autres, et à vouloir être regardé soi-même et l’estime public eut un prix. Celui qui chantait ou dansait le mieux ; le plus beau, le plus fort, le plus adroit ou le plus éloquent devint le plus considéré , et ce fut là le premier pas vers l’inégalité, et vers le vice en même temps : de ces premières préférences naquirent d’un coté la vanité et le mépris, de l’autre la honte et l’envie ; et la fermentation causée par ces nouveaux levains produisent enfin des

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