La théorie de la « voie de fait » est-elle encore utile à la protection des libertés ?
Dissertation : la théorie de la « voie de fait » est-elle encore utile à la protection des libertés ?
La théorie de la voie de fait est aujourd'hui « une des constructions jurisprudentielles les plus controversées du droit administratif français » selon Damien Thierry. La voie de fait est l’hypothèse dans laquelle l’administration soit a procédé à l’exécution forcée, dans des conditions irrégulières, d’une décision, même régulière, portant atteinte grave au droit de propriété ou à une liberté fondamentale, soit a pris une décision ayant l’un ou l’autre de ces effets, à condition que cette dernière décision soit elle-même manifestement insusceptible d’être rattachée à un pouvoir appartenant à l’autorité administrative.
Dans notre réflexion nous ne nous intéresserons qu’aux atteintes sur les libertés fondamentales et laisserons de côté les atteintes sur le droit de propriété.
Si la voie de fait est aujourd’hui tant controversée c’est que certains auteurs considèrent que l’instauration de la procédure du référé-liberté par la loi du 30 juin 2000 rend obsolète la théorie de la voie de fait. L’article L 521-2 qui résulte de cette loi dispose que : « saisi d’un demande en ce sens justifiée par l’urgence, le juge des référés peut ordonner toutes les mesures nécessaires à la sauvegarde d’une liberté fondamentale à laquelle une personne de droit public […] aurait porté, dans l’exercice de ses pouvoirs, une atteinte grave et manifestement illégale… » L’instauration du référé-liberté par la loi du 30 juin 2000 sonne-t-elle véritablement le glas de la théorie de la voie de fait ?
Des arrêts du Tribunal des conflits ultérieurs au 1er janvier 2001, date d’entrée en vigueur de cette loi, montre que la jurisprudence semble répondre à cette question par la négative... On peut citer à cet égard la décision du Tribunal des conflits rendue le 23 octobre 2000 dans l’affaire M.Boussadar contre Ministère des Affaires étrangères.