La tirade du nez
La tirade du nez traduit chez Cyrano une imagination et une créativité exceptionnelles, une mise en scène de la parole qui écrase le vicomte de Valvert réduit à l'impuissance verbale.
Le texte, très dense, se divise en deux parties: dans la première (v. 313-354), Cyrano se dédouble en introduisant une voix secondaire dans son discours ; dans la seconde, il réamorce le dialogue avec le Vicomte ("vous") sous la forme d'une longue apostrophe insultante et méprisante (v. 357).
Dans la première partie, divisée en vingt unités, Cyrano décline sur vingt tons différents les commentaires que suscite son nez sur le mode de l'autodérision. Ces "folles plaisanteries" ainsi qu'il les caractérise dans la 2ème partie (v. 362) attestent un incroyable talent d'invention dont il se réclame d'ailleurs (v.360) avec beaucoup d'assurance (v. 365-366).
À travers cette longue tirade, la langue de Cyrano se caractérise par : - ses outrances (Ex. La gradation: « C’est un roc!... C’est un pic!... C’est un cap!... Que dis-je, c’est un cap?... C’est une péninsule! » ), - sa poésie : (Ex. La métaphore: Faites-lui faire un petit parasol/De peur que sa couleur au soleil ne se fane ! » ; les jeux sur les sons comme l'allitération en "p" de vers 325-326 ou les rimes riches comme dans les vers 341-342), - sa créativité : (Ex. La création de mots nouveaux : Hippocampéléphantocamélos) - son humour : dans toute la première partie Cyrano se moque plaisamment de son nez.
Remarque 1 : morceau de bravoure, la tirade du nez utilise en abondance des constructions expressives (interrogations et exclamations), des phrases complexes, des temps verbaux sophistiqués comme le passé simple ("vous n'en eûtes") ou le subjonctif ("amputasse"), une large palette des niveaux de langages ("oblongue", "c'est-y un nez"), des références littéraires ("Aristophane"), géographiques (la mer Rouge"). Une