La verite
Qu’un homme s’assure de son bonheur par des moyens illégaux est moralement condamnable. Le fait demeure que celui qui s’enrichit plus vite par le vol, l’escroquerie et la corruption semble se préparer à vivre en donnant à ses désirs une plus grande chance d’être tous satisfaits. Il faut être réaliste et reconnaître que le bonheur d’un homme ne peut être mesuré à son honnêteté et son respect de la justice mais seulement à son pouvoir. Serait plus heureux celui qui peut satisfaire davantage de ses aspirations en accroissant son pouvoir d’agir. Dans la recherche des moyens de garantir son confort, sa sécurité et d’augmenter les plaisirs de la vie, ce qui compterait ce serait l’efficacité plutôt que l’honnêteté. Pour trouver le bonheur l’homme devrait agir par intérêt et non par devoir. Être heureux serait une question de technique et non de morale. L’essentiel alors est de demeurer impuni, de ne pas être pris en flagrant délit d’injustice car la prison constituerait un obstacle sérieux au bonheur. Mais un homme ne pourra pas s’estimer entièrement satisfait s’il pratique l’injustice puisque son bien impliquera le mal d’autrui. Il devra vivre avec la conscience du mal qu’il commet, ce qui suppose de le cacher aux autres dans le mensonge et à soi-même dans l’illusion, à moins qu’il n’assume un cynisme qui l’isole dans un monde jugé irrémédiablement malheureux. Un individu ainsi caractérisé par l’avidité de ses désirs peut-il illustrer la vie la meilleure dont les hommes soient capables ? En renonçant à la raison ne renonce-t-il pas à ce qu’il y a de meilleur en lui ? Il semble qu’on ne puisse plus parler d’un bonheur véritable mais seulement d’une illusion devenant dangereuse et inacceptable si elle nous fait négliger nos devoirs. Alors le bonheur ne se mesure-t-il que selon des critères techniques ou bien a-t-il pour condition nécessaire la pratique de la justice ?
Certes, avant Descartes, la conscience n'est pas ignorée. De Socrate, qui fait sien