Peu à peu, pour l'un et l'autre, un renversement de situation s'amorce. Eux qui, d'abord, font figure de dominants dans un contexte très favorable, vont devenir vulnérables. En effet, pour le héron, la faim se fait sentir au moment où malheureusement, plus aucune pitance ne semble disponible : « l'appétit vint », alors que « tout alla de façon: qu'il ne vit plus aucun poisson » est-il dit dans la fable. La Fille, pour sa part, va subir l'outrage des ans et voir sa beauté se flétrir. Sa cote, sur le marché de l'amour et du mariage, s'en trouve considérablement diminuée. « L'âge la fit déchoir » précise l'auteur, au point de « choquer et déplaire » ajoute-t-il, pour ensuite évoquer, suprême camouflet, « les ruines du visage ». Ceci va tout naturellement les amener l'un et l'autre à reconsidérer leurs exigences. Les chutes sont similaires, la moralité identique. Chacun est contraint de réviser à la baisse ses prétentions et de se montrer enchanté d'accepter un mets ou un parti bien modestes, voire médiocres. Ce choix, sur lequel l'un et l'autre se rabattent avec bonheur et gratitude, aurait pourtant été totalement inconcevable au début du récit... Jean de La Fontaine utilise, au terme des deux fables, un procédé stylistique, appelé chiasme, pour nous informer que Le Héron « fut tout heureux et tout aise de rencontrer un limaçon » et La Fille « tout aise et tout heureuse de rencontrer un malotru». Le dénouement de l' histoire est donc, pour les deux personnages, empreint paradoxalement d'une connotation plutôt positive.
Pour conclure, nous rappellerons que l'orgueil et le dédain dont font preuve Le Héron et La Fille les amènent à saborder leur destin. Pourtant, dans un contexte devenu peu enviable, ils semblent faire contre mauvaise fortune bon coeur et accepter avec joie et reconnaissance ce qui maintenant s'offre à eux. C'est une leçon à méditer !
Fables complémentaires : différentes, car elles évoquent deux personnages distincts (femme/homme, démuni/aisé,