Le bonheur de méditer
TRADUCTION
Sénèque donne son salut à son cher Lucilius.
Aujourd'hui, je me consacre à moi, non seulement grâce à moi (de mon fait), mais aussi à la faveur d'un spectacle qui a éloigné tous les gêneurs vers un jeu de ballon [sphaeromachia]. Personne ne fera irruption, personne n'entravera [impediet] ma pensée qui, grâce à cette assurance [fiducia] même, avance plus audacieusement. La porte [d'entrée] ne grincera pas à chaque instant [subinde], la tenture ne sera pas soulevée : il sera permis d'avancer en toute sécurité, ce qui est particulièrement nécessaire [magis necessarium] à celui qui va [eunti] par lui même (de lui même) et qui suit sa propre voie. Je ne suis [sequor ≠ est] pas les Anciens ? Je le fais, mais je me permets d'inventer certaines choses, de changer, d'abandonner [relinquere => relique] ; je ne suis pas leur esclave, mais je [les] approuve [assentior = défendeur ].
Mais j'en ai trop dit (≈ j'ai parlé trop vite), moi qui me promettais le silence et un refuge [secretum] sans importun [interpellatore] : voici qu'une immense clameur vient [perfertur] du stade et ne m'arrache [excutit] pourtant pas de moi-même (de ma réflexion), mais elle m'amène à une réflexion sur le spectacle lui-même [sur ces choses là même]. Je pense en mon for intérieur [cogito mecum] combien [nombreux] de gens exerçent leur corps, (et) combien peu leur intelligence ; quelle grande affluence se fait à un spectacle sans valeur durable [non fidele] et dérisoire [lusorium], quelle grande solitude il y a autour des connaissances de valeur [artes bonas] ; de quel faible esprit [imbecilli animo, complément de qualité] sont ceux dont on admire les biceps [lacertos] et les épaules [umeros]. Surtout je retourne cette pensée en moi : si le corps peut être amené par l'entraînement à cette endurance [patientam] grâce à laquelle il peut supporter [ferat] également les coups de poings et les coups de pieds [calces] et pas d'un seul homme (de plus