Le chocolat engendre-t-il des tueurs en série ?
Le 10 octobre dernier est parue dans le fort sérieux New England Journal of Medicine une étude qui a fait les délices de la presse généraliste. On y apprenait qu'il existait un lien de corrélation extrêmement significatif entre la consommation de chocolat par un pays et le nombre de prix Nobel que ledit pays décrochait. L'information a eu tant plus d'écho qu'elle a été publiée pendant la semaine où les Nobel 2012 étaient décernés. Tout en expliquant qu'une corrélation ne signifie pas forcément un lien de cause à effet, l'auteur de cette étude, Franz Messerli, fait tout pour en dénicher un ! Pour ce cardiologue, tout est dans les flavanols, des molécules antioxydantes présentes dans le cacao, dont plusieurs études ont montré qu'elles améliorent les fonctions cognitives. Tout se tient : les pays où l'on mange beaucoup de chocolat font des habitants plus intelligents et ont donc plus de prix Nobel. La possibilité que le lien de cause à effet soit inversé – dans les pays les plus intelligents et donc les plus comblés en prix Nobel, on sait les vertus bienfaisantes du chocolat sur la santé et on en mange davantage – est, selon Franz Messerli, concevable mais improbable.
Ce genre d'étude fait les choux gras de la presse et plaît beaucoup au public, notamment parce que le mécanisme présenté est à la fois astucieux et simple à comprendre. Il n'empêche : le glissement d'un simple lien de corrélation statistique à un lien de cause à effet est un exercice périlleux. La raison principale tient au fait que si X et Y sont statistiquement corrélés, cela ne signifie pas forcément que l'un provoque l'autre : X et Y peuvent parfaitement être deux conséquences de la même cause. L'exemple le plus fréquemment cité est le suivant : dans une ville, plus les gens achètent de cornets de glace, plus il y a de noyades. Le lien semble "évident" : les baigneurs gavés de glace à la vanille ou à la fraise font des malaises en se baignant et en