"Un cinéma militant qui braille et qui gueule, un autre qui murmure"(ou les voix militantes du off) La mine paysage dure et sombre où la poussière recouvre tout, la mine décor de roman, prétexte à belle image, source inépuisable d'effets faciles… Mais la mine qu'est-ce encore ? C'est surtout et avant tout des hommes (…). Ces hommes meurent jeunes parce qu'ils sont imprégnés de la poussière du charbon qui, moi après mois, ronge leurs poumons. Juste après un carton sibyllin sur fond noir[1], accompagné par une musique dramatisante, se succèdent quelques plans de paysages miniers et de mineurs au travail, et déjà se déversent ces paroles en un flot ininterrompu, parfaitement articulées et clamées, au ton et au contenu eux-mêmes dramatiques. Le modèle narratif de La grande lutte des mineurs est celui des actualités filmées, mais il s'agit ici d'actualités ouvrières ou prolétariennes, de conte-actualités, qui rendent compte de la tension du contexte sociale et politique nationale (la terrible grève des mineurs français en octobre 1948) et internationale (la guerre froide). L'ouverture de ce film collectif est brutale et le rythme va cependant crescendo : une construction classique, ternaire, rappelle d'abord les sacrifices récents des mineurs et les raisons de la grève, la partie centrale suit le déroulement de celle-ci en insistant sur les violences de la répression, et le film s'achève enfin par un appel enflammé, au peuple et à la solidarité… Par le verbe, l'image et le son, tout concourt dans ce film d'agit prop' à interpeller le groupe de spectateurs. La mort et la violence sont partout présentes : images de mutilés et d'accidentés du travail, images d'armes et d'affrontements, commentaire précisant que pour les mineurs espagnols antisfascistes menacés d'expulsion, «l'expulsion, c'est la mort». Tourné en son muet, les monteuses son et images ajoutèrent non seulement la musique et ce commentaire qu'elles écrivirent en toute urgence sur un coin de table