Le concept de puissance dans les relations internationales
Le concept de puissance est-il encore opératoire ?
Pour reprendre les termes de Raymond Aron, « peu d’auteurs français ont exalté la politique de puissance à la manière de quelques doctrinaires allemands la Machtpolitik, peu d’auteurs français ont condamné la politique de puissance à la manière dont quelques moralistes américains ont condamné la power politics ». Pourtant, peu de concepts sont aussi couramment employés et aussi équivoques que celui de puissance et il est impossible de réfléchir aux relations internationales sans être confronté à ce thème. Les relations internationales ont en effet longtemps été l’étude des puissances et de leurs conflits.
Pourtant, aujourd’hui, le concept de puissance semble traverser une crise : après la guerre froide qui a marqué la surenchère à la puissance, ce concept semble n’être plus viable dans un monde apaisé et régi par le droit, dans un monde où les oppositions entre puissances semblent finies. On peut donc s’interroger sur la validité de penser les relations internationales en termes de conflits entre puissances, à l’heure de la coopération et de l’interdépendance : la notion de puissance permet-elle encore d’expliquer les enjeux du monde moderne ?
D’un côté, la puissance fait figure de concept dépassé ne pouvant aboutir qu’à des guerres ; d’un autre côté, la puissance est un concept universel qui ne fait que se transformer à la nouvelle donne des relations internationales. Afin de résoudre ce problème, il est nécessaire de s’attacher à l’évolution de cette notion avant de décrire son actualité sur la scène internationale.
I. De la puissance unique objet des relations internationales à la puissance discrédité
A. Le rapport de puissance, fondement des relations internationales classiques
Je vais tout d’abord tenter de définir le concept de puissance. Au sens le plus général, la puissance est le pouvoir de faire, produire ou détruire. Cependant, la puissance d’une personne ou d’une