Au début de l'année 2010, Valérie Pécresse, l'actuelle ministre de l'enseignement supérieur, a entamé des discussions avec les grandes écoles pour porter à 30% la part des boursiers dans les rangs des étudiants de ces structures d'élite. Cet objectif est particulièrement symbolique : il se présente comme un acte fort en faveur de "l'égalité des chances", considérée en crise dans un contexte de discriminations sociales dans la poursuite des études et à l'embauche. Cependant cette initiative n'est pas sans interroger les principes de notre démocratie, méritocratique par définition : même si cette orientation ne toucherait au final qu'une très faible proportion des étudiants issus des catégories populaires, elle constitue une "discrimination positive" qui pourrait exclure certains étudiants qui aurait bénéficié de ces places en GE sur la seule base de leur mérite scolaire. Si ce cap a été globalement ressenti comme un signal positif, reste qu'il illustre les tensions entre liberté individuelle et égalité dans le contexte démocratique : toute action en faveur de l'égalité, même souhaitable, se traduit par une régulation qui encadre forcément les initiatives individuelles. Poussées trop loin, ces interventions peuvent même contredire les légitimes prétentions de la liberté.

Une « inégalité » se distingue de la simple différence ; elle intègre un jugement qui dénonce une situation jugée injuste ou indigne. Les « démocraties » modernes ont refondé le contexte de l'égalité. En dépassant l'évidente égalité juridique des citoyens, les démocraties modernes développent une exigence sociale à la mobilité et à la reconnaissance du « mérite ».

Confronté aux situations inégalitaires, les citoyens réagissent de manière différente. Pour certains, elles apparaissent acceptables dès lors qu'elles résultent d'une régulation qui récompense les plus efficaces. D'autres se réclament d'un idéal égalitaire qui appelle une correction étatique des positions inégalitaires, susceptibles