Le désir peut-il se satisfaire de la réalité?
A première vue, il semble assez évident que le désir, loin de se satisfaire de la réalité, ne cesse de se plaindre de ses manques. Contrairement au besoin, qui disparaît une fois assouvi, le désir semble « jouer à saute-mouton », se portant incessamment d’un objet à l’autre en dépassant chacun vers ce qui lui semble être encore mieux. Mais un objet ne nous satisfait-il plus parce qu’il lui manque quelque chose, ou bien parce que notre désir s’en est lassé ? Il s’agit de savoir si l’insatisfaction ressentie provient de l’objet lui-même ou du désir. Dans le premier cas, on pourrait se dire que, peut-être, on n’a pas encore trouvé l’objet satisfaisant, mais qu’il faut continuer à chercher. Dans le second cas, on devrait reconnaître que toute recherche serait vaine, car il serait de l’essence même du désir de ne pouvoir jamais être satisfait d’aucune réalité. Dans les deux cas, la question nous invité à interroger l’essence du désir. Demander se le désir peu se satisfaire de la réalité, c’est demander si le fait d’être comblé fait partie des possibilités du désir. Mais, s’il est de l’essence du désir de rester insatisfait et insatiable, faut-il s’en émouvoir ou s’en réjouir ? Pourquoi, en effet, vouloir satisfaire le désir s’il s’avère que celui-ci est par essence insatiable ? Deux problématiques s’entrecroisent au cœur de cette question : celle qui interroge l’essence du désir et celle, moralisante, qui s’interroge sur l’attitude qu’il convient de prendre (s’en réjouir ou la regretter ?) devant l’instabilité du désir. L’enjeu de ces questions dépasse la recherche de l’essence du désir en ce qu’elle réinterroge l’essence même de l’homme.
Première partie :
Que le désir ne puisse se satisfaire de la réalité est ce que les philosophes grecs ont à la fois unanimement constaté et regretté. Si les hommes désiraient moins ou ne désiraient pas, ils seraient plus heureux. La problématique du désir se trouve ainsi, dès le début,