Le juge administratif, juge constitutionnel ?
« En l'état actuel du droit public français, [le] moyen [de contrariété d'une loi aux lois constitutionnelles de 1875) n'est pas de nature à être discuté devant le Conseil d'Etat statuant au contentieux » : c'est en des termes clairs et fermes que la Haute juridiction administrative affirma, dans l'arrêt de section Sieur Arrighi du 6 novembre 1936, qu'il lui était impossible de s'assurer de la constitutionnalité des lois.
Cette affirmation de principe fut maintes fois réitérée, en dépit des évolutions de notre système juridique et des changements de Constitution. Notamment, alors que dans un arrêt du même jour, l'Assemblée du contentieux du Conseil d'Etat admettait enfin de contrôler la conventionnalité des lois, elle se refusa à opérer un contrôle comparable au regard de la Constitution en des termes dénués d'ambiguïté : »il n'appartient pas au juge administratif d'apprécier la constitutionnalité d'une loi » (CE, Ass., 20 oct. 1989, Roujansky).
Sous la Vème république, cette situation peut aisément s'expliquer, dans la mesure où il existe, en droit français, depuis son instauration en 1958, un organe chargé du contrôle de la constitutionnalité des lois : le Conseil constitutionnel.
Au demeurant, c'est à l'existence de ce dernier que se réfère le CE lorsqu'il rappelle, encore, de façon dialectique, dans un arrêt du 5 janvier 2005, Mlle Y et M X, que « l'article 61 de la constitution du 4 octobre 1958 a confié au conseil constitutionnel le soin d'apprécier la conformité d'une loi à la constitution; que ce contrôle est susceptible de s'exercer après le vote de la loi et avant sa promulgation; qu'il ressort des débats tant du comité consultatif constitutionnel que du CE lors de l'élaboration e la constitution que les modalités ainsi adoptées excluent un contrôle de constitutionnalité de la loi au stade de son application ».
Dans ces conditions, d'évidence, le juge administratif n'est pas un juge