Le loup et l'agneau
La raison du plus fort est toujours la meilleure : Nous l'allons montrer tout à l'heure (1). Un Agneau se désaltérait Dans le courant d'une onde pure.
Un Loup survient à jeun, qui cherchait aventure, Et que la faim en ces lieux attirait.
Qui te rend si hardi (2) de troubler mon breuvage ? Dit cet animal plein de rage :
Tu seras châtié de ta témérité.
Sire, répond l'Agneau, que Votre Majesté Ne se mette pas en colère ; Mais plutôt qu'elle considère Que je me vas (3) désaltérant Dans le courant, Plus de vingt pas au-dessous d'Elle ;
Et que par conséquent, en aucune façon, Je ne puis troubler sa boisson.
Tu la troubles, reprit cette bête cruelle,
Et je sais que de moi tu médis l'an passé.
Comment l'aurais-je fait si (4) je n'étais pas né ? Reprit l'Agneau ; je tette encor ma mère Si ce n'est toi, c'est donc ton frère. Je n'en ai point. C'est donc quelqu'un des tiens : Car vous ne m'épargnez guère, Vous, vos Bergers et vos Chiens.
On me l'a dit : il faut que je me venge." Là-dessus, au fond des forêts Le loup l'emporte et puis le mange, Sans autre forme de procès.
Voici une des fables les plus connues...
Le terme de "procès" employé à la fin de la fable peut faire réfléchir en quoi elle peut exposer réellement un procès.
" L.F. fixe en ses vers les circonstances respectives de ceux qui sont dans le récit accusateur (le Loup) et défenseur (l'Agneau) plaidant la cause de la victime (le Loup) face à l'agresseur (l' Agneau) afin que le lecteur soit le juge de cette cause"
(Patrick Goujon, Le Fablier, N°3 )
" [...] la prétention du Loup qui veut avoir raison dans son injustice, et qui ne supprime tout prétexte et tout raisonnement que lorsqu'il est réduit à l'absurde par la