Le malade immaginaire
Tout d'abord, des allusions à d'authentiques médecins suffisent à souligner leur incompétence : "Plusieurs médecins, dit Valère (I, 4) en parlant de Lucinde, ont déjà épuisé toute leur science après elle"... Aucun de ces médecins n'a donc été capable de voir que la jeune fille simulait une maladie. Selon le témoignage de deux paysans, Thibaut et Perrin, la malheureuse "Parette" garde le lit depuis six mois, en dépit de tous les traitements... ou peut-être à cause d'eux!
Les méthodes employées, ensuite, sont fidèlement rapportées par Sganarelle : le "petit clystère dulcifiant" et la "petite saignée amiable", qu'il propose, badin, à Jacqueline, (II, 4) faisaient bien partie de l'arsenal thérapeutique du XVIIe siècle, ainsi que le "vin émétique", qui faillit envoyer ad patres Parette (III, 2). La volonté de "purger" le corps de ses "humeurs", de le "vider" est nettement affirmée : il s'agit là d'un dogme médical de l'époque, et Sganarelle en prend le contre-pied. Il conseille en effet de donner à Lucinde "quantité de pain trempé dans du vin" (II, 4), et Parette devra avaler "un morceau de formage". Alors que les vrais médecins s'acharnent sur le corps, jusqu'à ce qu'il soit émacié et exsangue, Sganarelle fait manger ses patients : le faux médecin est du côté de la vie, et du rire qui en est inséparable pour Molière. Ces médecins - qui ne sont que des charlatans - ont besoin d'impressionner les malades ; puisqu'ils ne peuvent compter sur leurs résultats, ils vont recourir à l'apparence, et c'est dans cette perspective qu'il faut analyser les