Le modèle occidental existe-t-il encore ?

« Les démocraties libérales contemporaines ne sont pas nées des brouillards mystérieux et remplis d’ordre de la tradition. A l’instar des sociétés communistes, elles ont été délibérément créées par des êtres humains à un moment précis de l’histoire, sur la base d’une certaine conception théorique de l’homme et des institutions politiques appropriées qui doivent le gouverner. ». Ce que montrent ces premières phrases du chapitre « Les premiers hommes » de l’œuvre de Francis Fukuyama La fin de l’histoire et le dernier homme, ce n’est pas seulement que notre régime politique actuel est née d’une volonté consciente, ainsi que les sociétés communistes, mais aussi implicitement qu’on ne peut étudier les démocraties libérales, ni même peut-être le monde occidental, sans le comparer au monde communiste. On ne peut en tout cas comprendre son existence sans la mettre en parallèle avec celle des sociétés du bloc de l’Est.
C’est une des principales critiques qui ont été faites à La fin de l’histoire et le dernier homme, et on peut bien entendu la généraliser à tout le monde intellectuel de l’Ouest de la fin des années 80 ; c’est de ne pas avoir su concevoir l’existence d’un modèle occidental sans celle du contre-modèle du meilleur ennemi, le modèle soviétique. A tel point que désormais, on se demande ce qu’est devenu le modèle occidental. En effet, la disparition du modèle soviétique a été vécu comme un triomphe ; mais la mort du monde bipolaire, causée par la disparition du modèle soviétique ainsi que l’apparition d’un monde multipolaire a lentement entrainé cette question : le modèle occidental existe-t-il encore ?
L’ouvrage de Fukuyama précédemment cité est l’incarnation de ce fil de pensée. La fin du monde et le dernier homme est symptomatique de l’époque où la tension de la Guerre froide et la menace nucléaire, mais aussi la fin d’une sorte d’attente, d’un tunnel étaient des sensations et des pensées prégnantes. C’est