La définition du patrimoine est une création doctrinale basée sur la théorie d’Aubry et Rau. Il s’agit de l’ensemble des rapports de droits appréciables en argent, qui ont pour sujet actif ou passif une même personne et qui sont envisagés comme formant une universalité juridique. De ce que le patrimoine est à la projection de la personne sur le terrain des intérêts matériels, actifs et passifs, découlent quatre principes : *seules les personnes physiques ou morales peuvent avoir un patrimoine de sorte qu’il ne peut exister de patrimoine sans une personne qui lui serve de support ; *toute personne a nécessairement un patrimoine car elle est apte à avoir des droits et des obligations qui prennent place dans ce contenant ; *le patrimoine reste lié à la personne aussi longtemps que dure la personnalité, il est donc intransmissible entre vifs ; *une personne n’a qu’un patrimoine , celui-ci n’est pas plus divisible que la personnalité. Mais à l'heure actuelle, près de 200 ans après la naissance de cette théorie, il est nécessaire de se demander si la conception du patrimoine comme envisagé par Aubry et Rau trouve encore une application pleine et entière en droit français, et surtout une application en cohérence avec les attentes des sujets de droit actuels. Elle se heurte aujourd'hui à d'autres conceptions que l'on pourrait qualifier « d'anglo-germaniques ». La conception française du Patrimoine est-elle encore pertinente face aux mutations des structures sociales et aux approches anglo-saxonnes ? Est-elle encore adaptée pour faire face aux défis de nature économique, financière mais aussi sociale qui se dressent devant nous ? L'harmonisation européenne nous amène certainement, à considérer d'autres conceptions du patrimoine, plus pragmatiques et s'adaptant mieux aux évolutions de la conjoncture et de la société. Pourrons-nous longtemps rester hermétiques à ces pratiques (patrimoine d’affectation, fiducie) qui permettent d'appréhender une réalité complexe et mouvante ?