Le personnage de roman du xviie siècle à nos jours
Ce sont surtout des personnages adultes qui peuplent les romans contemporains. Pour réussir à se mettre dans la peau d’un enfant et lui donner la parole de manière crédible, un écrivain ne peut pas se contenter de faire appel à ses propres souvenirs.
Dans les coulisses de la fiction
Bernard Pingaud construit un subtil jeu de miroir entre l’auteur, le narrateur, le lecteur et le critique.
De L’Empreinte de l’ange à Prodige, l’enfance est pré- sente dans la plupart de ses romans. Elle occupe cependant une place centrale dans Lignes de faille, le dernier d’entre eux. Nancy Huston a voulu se mettre succes- sivement dans la tête de quatre garçons et filles de 6 ans, dont chacun est le parent du précédent. « L’enfance m’intéresse, et elle m’inspire, confie-t-elle. On écrit à partir de ce qui nous a constitués, de ces choses qui sont à la fois notre source et notre blessure. Certains refoulent l’enfant qu’ils ont été, comme s’ils avaient peur d’être réduits à cette position de faiblesse. Une certaine littéra- ture européenne contemporaine manifeste même une haine de l’enfantement. »
La romancière canadienne a vécu un traumatisme à l’âge de 6 ans : le départ de sa mère. Son père s’est remarié et a quitté le Canada pour s’installer dans le New Hampshire, aux États-Unis. Avec l’absente, la fillette puis l’adoles- cente n’a plus eu qu’un lien nourri d’imaginaire. « Quand on vit un tel événement, remarque Nancy Huston, on s’interroge, on fait des hypothèses, on imagine... Cet évé- nement traumatisant de l’enfance a fait de moi une romancière. J’ai pris conscience que le monde était une scène, j’ai compris le côté théâ- tral des relations humaines, et cela a commencé à me fasciner. » Plus tard, ses identités multiples nour- riront des œuvres de fiction. Dans Les Variations Goldberg, son pre- mier roman, elle dit « je » au nom de trente personnages différents...
Pour Lignes de