Le rat des villes et le rat des champs, jean de lafontaine
(2) Sur un tapis de Turquie. Ce seul mot suffit à La Fontaine pour donner l'idée la plus étendue de l'appartement où le sybarite a reçu son convive, comme dans le vers précédent il avoit su exprimer la magnificence du festin par ces reliefs d'ortolans, morceaux faits pour la table des Rois.
(3) Je laisse à penser la vie
Que firent ces deux amis. Horace fait de son Rat un épicurien qui disserte longuement sur la nature du plaisir et du bonheur. I La Fontaine se contente de donner aux deux hôtes un grand appétit. Il a vu que dans l'apologue la philosophie ne tenoit point école, et n'avoit droit de se montrer que sous le masque et en passant. La fable d'Horace est un chef-d'œuvre sans doute ; celle de La Fontaine n'en est pas moins supérieure , et l'on peut ap pliquer à celle-ci le vers du Lyrique latin : O mat ré pulchrd filia pulchrior !
(4) Fi du plaisir. Cette expression ne paroîtroit triviale qu'à ceux qui perdroient de vue les acteurs de cette jolie scène.
Le canevas de départ de cette fable est à rechercher à la fois chez Aphtonius et chez un auteur anonyme. La description du thème a été reprise d ’Horace (« Satires », II, 4 ; dans ce texte, Catius et Horace discutent de la mémoire ; Horace décrit par cœur une table particulièrement bien garnie). La Fontaine traite ici un lieu commun - que nous retrouverons dans d’autres fables - entre les tracas de la ville et la quiétude de la campagne. Et il prend position lui, le maître des Eaux et Forêts qui pouvait rester assis sous un arbre sans voir tomber la nuit, prend évidemment parti pour le calme de la vie à la campagne, position qu’il a déjà défendue dans « Le Songe de Vaux » (fragment II, harangue d’Hortésie) ou