Le roman
Introduction
C’est souvent dans les préfaces à leurs œuvres que les romanciers justifient leurs choix esthétiques et leur conception du roman, mais la correspondance privée est aussi le lieu où ils font part de leur travail, de leurs interrogations, de leurs hésitations. L’on comprend mieux la genèse de Madame Bovary en lisant les lettres de Flaubert à son amie Louise Colet. Ainsi, le jeune Stendhal, Henry Beyle à l’état civil, confie à sa sœur Pauline dans une lettre datée du 3 août 1804 : « Tu sais bien que, dans les romans, l’aventure ne signifie rien : elle émeut, et voilà tout ; elle n’est bonne ensuite qu’à oublier.
Ce qu’il faut, au contraire, se rappeler, ce sont les caractères. » Le futur auteur du Rouge et du Noir (1830) et de La Chartreuse de Parme (1839) établit une hiérarchie entre les caractères, c’est-à-dire l’évocation psychologique des personnages, et l’intrigue, le déroulement des événements qui toucheraient le lecteur sans lui apporter de matière à réflexion. Faut-il souscrire à un tel jugement de valeur ? L’intrigue qui captive tant, notamment dans les romans d’aventures ou les romans historiques, a-t-elle si peu d’importance et de sens ?
Il convient de voir dans quelle mesure le roman met en avant l’étude des person- nages, de leur caractère et de leur comportement, puis de montrer l’intérêt de ce que Stendhal met au second plan, l’intrigue. Finalement, le contenu narratif et les person- nages ne s’effacent-ils pas derrière le monde intérieur du romancier, son approche singulière de la réalité ?
I Le roman vaut par l’étude des caractères et des conduites de ses personnages
I-1 Un arrière-plan historique qui s’efface au profit de l’héroïne Dans La Princesse de Clèves de Mme de La Fayette, le décor historique reste à l’arrière-plan. L’attention se concentre sur trois personnages : la princesse, son mari et Nemours, sur l’amour et le renoncement héroïque et inquiet de Mme de Clèves.
I-2 Une intrigue émouvante qui compte