Le trafic des femmes

18895 mots 76 pages
La littérature sur les femmes — tant féministe qu’antiféministe — est une longue rumination quant à la nature et à la genèse de leur oppression et de leur subordination sociale. La question n’est pas sans importance, car les réponses qui lui sont données déterminent la manière dont nous envisageons l’avenir et si nous jugeons réaliste ou non d’espérer une société égalitaire entre les sexes. Plus important, l’analyse des causes de l’oppression des femmes fonde toute estimation de ce qu’il faudrait exactement changer pour réaliser une société sans hiérarchie de genre. Ainsi, si la cause de l’oppression des femmes réside dans l’agression et la dominance masculines, alors le programme féministe devrait logiquement exiger soit l’extermination du sexe incriminé, soit encore un plan d’eugénisme pour modifier sa personnalité. Si le sexisme est un sous-produit de l’implacable appât du gain du capitalisme, alors le sexisme disparaîtrait avec l’avènement d’une révolution socialiste réussie. Si la grande défaite historique du sexe féminin s’est produite par intervention d’une révolte armée patriarcale, alors il est temps que les guérillas amazones commencent à s’entraîner dans les Adirondacks.
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Il n’est pas question dans ce texte de mener une critique soutenue des explications courantes de la genèse de l’inégalité sexuelle — telles les théories populaires de l’évolution dont un exemple est le livre The Imperial Animal ou celles d’un soi-disant renversement de matriarcats préhistoriques ou les tentatives de tirer du premier volume du Capitall’ensemble des phénomènes de subordination sociale. Au lieu de cela, je veux esquisser ici quelques éléments d’une autre explication du problème. * 1 En fait la version anglaise dit « certain relations », i. e. certains rapports sociaux. (N.d.T.) (...)
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Marx avait posé cette question : « Qu'est-ce qu'un esclave nègre ? Un homme de race noire. Cette explication a autant de valeur que la première. Un nègre est un nègre. C'est

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