le vieillard et les trois jeunes hommes
Cette fable n’a pas la perfection qu’on admire dans plusieurs autres, si on la considère comme apologue. On peut dire même que ce n’en est pas un, puisqu’un apologue doit offrir une action passée entre des animaux, qui rappelle aux hommes l’idée d’une vérité morale, revêtue du voile de l’allégorie. Ici la vérité se montre sans voile : c’est là chose même et non pas une narration allégorique. Mais si on considère cette fable simplement comme une pièce de vers, elle est charmante et aussi parfaite pour l’exécution, qu’aucun autre ouvrage sorti des mains de La Fontaine. Examinons-la en détail.
V. .3. Passe encor de bâtir; mais planter a cet Age ! Ce vers est devenu proverbe; et on le le souvent à l’occasion de ceux qui se sont mis dans le même cas. Le discours des jeunes gens est assez raisonnable, mais il y a un mot qui ne convient qu’à des étourdis, c’est celui du vers 4 :
Assurément il radotait.
On verra pourquoi La Fontaine leur prête ce propos assez, impertinent.
V. 11. Quittez le long espoir et les vastes pensées. Quelle force de sens et quelle précision!
V. 12. Tout cela ne convient qu’à nous. Mot important. Voilà le sentiment qui les fait parler. La réponse du vieillard est admirable et cause une sorte de surprise. Le lecteur trouvait, comme ces jeunes gens, que ce vieillard est assez peu sensé. Le premier mot de sa réplique annonce un sage:
V. 13. Il ne convient pas a vous-mêmes, . .
Cinq ou six vers après, on voit que c’est un sage très-agréable.
V. 21. Mes arrière-neveux me devront cet ombrage:
Hé bien, défendez-vous au sage
De se donner des soins pour le plaisir d’autrui?
La jouissance des autres est la sienne.
V. 24.. Cela même est un fruit que je goûte aujourdhui: Quel mélange de sentiment et de véritable philosophie!
V.26. Je puis enfin compter l’aurore
Plus d’une fois sur vos tombeaux.
A la vérité, ce mot est un peu dur ; mais il l’est beaucoup moins que le propos de ces jeunes gens: Assurément