Le vin français vers la chine
GEVREY-CHAMBERTIN — En Bourgogne, "le débat n'est pas que ce soit un Chinois" qui a acquis le château de Gevrey-Chambertin, lâche le vigneron Jean-Marie Fourrier, "mais il l'a payé le double du prix. Ca fait exploser la valeur des terres", et par ricochet les droits de succession.
La valeur officielle de "l'ouvrée" (1/24e d'hectare) de vigne est calculée en fonction des dernières transactions notariales, qui servent ensuite au calcul des droits de succession (33% de la valeur).
L'ouvrée était à 18.000 euros à Gevrey, mais l'acheteur du château, propriétaire de salles de jeux à Macao, a payé le double en mai. Du coup, beaucoup de vignerons bourguignons craignent de ne plus pouvoir transmettre leur patrimoine à leurs enfants.
Et l'inflation continue: près de Gevrey, le milliardaire français François Pinault a acquis en juin une ouvrée de Puligny-Montrachet, un grand cru certes, mais pour un million d'euros!
"A ce rythme, on va tous se retrouver imposés sur la fortune. Une folie! C'est notre outil de travail. Et les jeunes qui veulent s'installer? Que l'Etat fasse quelque chose", s'énerve un exploitant résumant l'opinion générale.
"Quand mon grand-père a acheté des vignes en 1955, il a remboursé en un an. Aujourd'hui il faut des décennies", renchérit Jean-Marie Fourrier, qui exploite 10 hectares à Gevrey.
"Il y a déjà des gens qui vendent un bout de leur domaine pour payer les droits de succession", abonde Margaret Bastien, propriétaire de 4 hectares bio sur la commune.
Au pied du mont Afrique, des localités aux noms alléchants se succèdent sur la plaine de la Côte-d'Or semée de vignes: Beaune, Nuits-Saint-Georges, Vosne-Romanée, Morey-Saint-Denis, Gevrey-Chambertin...
Des bâtiments médiévaux surgissent régulièrement, tel le château de la discorde, achevé au XIIe siècle, aux pierres branlantes et aux toits moussus, qui "ne se visite plus", indique une pancarte. Rouvrira-t-il