Lecture analytique d'un extrait du premier chapitre de voyage au bout de la nuit de louis-ferdinand celine, 1952
Cet extrait du premier chapitre de Voyage au bout de la nuit de Louis-Ferdinand Céline, paru en 1952, présente au lecteur le personnage de Bardamu, étudiant en médecine, aux côtés de son ami Arthur Ganate, conversant tous deux à la terrasse d'un café parisien. L'histoire se déroule sous la Troisième République, au seuil de la Première Guerre Mondiale, contexte historique déterminant pour la bonne compréhension de cet extrait. Ce dernier est d'ailleurs emblématique de l'écriture célinienne, attachée à reproduire un parler populaire et exprimant la difficulté de vivre dans un monde gouverné par l'absurde. Nous nous proposons d'étudier dans ce passage le registre polémique1. En quoi détermine-t-il une vision cynique et pessimiste du monde? Nous étudierons tout d'abord comment l'extrait s'organise autour d'une discussion animée entre les deux personnages, pour nous concentrer ensuite sur les opinions de Bardamu.
I/ UNE DISCUSSION ANIMEE
a) Une discussion spontanée et légère
Les indices du texte semblent minimiser l'importance des échanges entre Arthur et Bardamu.
Il n'y a pas d'ordre précis à la discussion: « Après, la conversation est revenue sur le Président Poincaré » (l.1) →le retour sur un sujet déjà abordé indique que l'entretien est libre, ce que confirme la locution adverbiale « de fil en aiguille ».
Le sujet même du début de la conversation paraît même ridicule, anodin (« une exposition de petits chiens »)
La conversation est jalonnée d'expressions qui indiquent la légèreté: « qu'il me taquine Arthur Ganate, à ce propos » (l.5-6)→ la discussion débute sur un mode ludique
« que j'ai répondu moi pour montrer que j'étais documenté et du tac au tac » (l.8 à 10) → le narrateur feint le sérieux, propos hasardeux et spontané « Un petit malin.... dans les opinions » (l.41-42) → on observe pour cette citation une antiphrase2