Les écarts poétiques
Corrigé des questions p Question 1
Le sonnet de Baudelaire «Correspondances» et le poème en prose de
P. Delerm présentent tous deux des images inhabituelles qui nous apparaissent comme des «écarts» par rapport à notre langage quotidien.
Le premier tercet du sonnet de Baudelaire comporte une image particulièrement frappante: «Il est des parfums frais comme des chairs d’enfants
Doux comme les hautbois, verts comme les prairies.»
Cette triple comparaison illustre la strophe 2 et constitue une application de la théorie des correspondances entre les sensations, appelée synesthésie. Ici les perceptions olfactives sont liées à des sensations tactiles, auditives et visuelles et cette «alchimie» tend à rendre au plus juste et dans sa variété l’impression ressentie. Cette «correspondance» est rendue possible par la polysémie de «frais» – on parle de fraîcheur olfactive, tactile et visuelle – qui admet plusieurs comparants pour un même comparé
(les parfums).
Le texte de P. Delerm pour sa part se termine sur une métaphore surprenante.
À mi-chemin entre des métaphores et des expressions qui nous sont déjà familières comme « le chemin de la pensée » ou « les lieux de mémoires» (pour désigner des lieux souvent douloureux de l’Histoire), Philippe
Delerm invente avec bonheur une métaphore originale – «des routes de mémoire» – pour conclure «Le bruit de la dynamo».
L’expression joue en effet poétiquement sur le propre et le figuré, l’abstrait et le concret : c’est un déplacement nocturne sur une route de campagne qui, avec la mise en marche de la dynamo et son bruit familier, fait magiquement resurgir tout un passé, mettant en «route» la mémoire du narrateur.
C’est désormais sur les «routes» plurielles du souvenir qu’il poursuit sa promenade, celles qu’il a parcourues dans son enfance, vers l’école, la ferme, ses coins de pêche, et qui maintenant, par le jeu de la «mémoire» se superposent à la route bien réelle qu’il parcourt.