Passons maintenant à l'étude des relations humaines entre Claire, dans le rôle de Madame, et Solange, sa servante. Nous examinerons, en premier lieu, les manifestations de leur opposition, puis finalement le double univers auquel appartient Claire. Madame et Solange s'opposent par leur ton et leurs paroles: le ton de Madame est violent, sévère, alors que celui de Solange est plutôt soumis. La violence de Madame se manifeste principalement par des phrases vives, elliptiques, comme: «Et ses gants!» où le ton tragique et exaspéré de Claire, précisé dans les didascalies, crée une atmosphère tendue. Madame insinue aussi certaines accusations, pose des interrogations indirectes, mais ne laisse guère le temps à Solange de répondre ou de répliquer. C'est ainsi que Claire dit, en parlant des gants de caoutchouc que porte la domestique dans ses mains: «C'est avec ça, sans doute, que tu espères séduire le laitier. Non, non, ne mens pas, c'est inutile.» Ses ordres sont secs: «Sors. [...] Mais cesse! [...] Sors!» et ses phrases, "cassées" par la colère: «Tout, mais tout! ce qui vient de la cuisine est crachat.» Madame sait parfois être d'une grande cruauté, comme en fait foi cette antithèse: «Ah! ah! vous êtes hideuse, ma belle.» Tout cela nous amène à percevoir un mépris violent de Madame envers sa bonne, lequel atteint son apogée, menaçante, à la fin de l'exposition, où Claire dit: «Je serai belle. Plus que vous ne le serez jamais.» D'un autre côté, les silences de Solange, son humilité et ses douces paroles cachent une certaine ambiguïté à l'égard des sentiments qu'elle éprouve pour sa gouvernante: un mélange de soumission et de haine. Claire le voit d'ailleurs très bien, puisqu'elle est elle-même une domestique habituellement. Elle comprend donc le jeu de l'humilité et des prévenances sous lesquelles se dissimulent la haine: «Il y a trop de fleurs. C'est mortel.»
Claire appartient à un double univers: celui de bonne, son rang social habituel, et