Les caprices de marianne
Alfred de Musset
1833
PERSONNAGESCLAUDIO, juge.COELIO.OCTAVE.TIBIA, valet de Claudio.PIPPO, valet de Coelio.MALVOLIO, intendant d’Hermia.Un garçon d’auberge.MARIANNE, femme de Claudio.HERMIA, mère de Coelio.CIUTA, vieille femme.DOMESTIQUES. |
ACTE I
La scène est à Naples.
Scène 1
Une rue devant la maison de Claudio.
MARIANNE, sortant de chez elle un livre de messe à la main et CIUTA, l’abordant.
CIUTA.— Ma belle dame, puis-je vous dire un mot ?
MARIANNE.— Que me voulez-vous ?
CIUTA.— Un jeune homme de cette ville est éperdument amoureux de vous ; depuis un mois entier, il cherche vainement l’occasion de vous l’apprendre ; son nom est Coelio ; il est d’une noble famille et d’une figure distinguée.
MARIANNE.— En voilà assez. Dites à celui qui vous envoie qu’il perd son temps et sa peine et que s’il a l’audace de me faire entendre une seconde fois un pareil langage j’en instruirai mon mari.
Elle sort.
COELIO, entrant.— Eh bien ! Ciuta, qu’a-t-elle dit ?
CIUTA.— Plus dévote et plus orgueilleuse que jamais elle instruira son mari, dit-elle, si on la poursuit plus longtemps.
COELIO.— Ah ! Malheureux que je suis, je n’ai plus qu’à mourir ! Ah ! La plus cruelle de toutes les femmes ! Et que me conseilles-tu, Ciuta ? Quelle ressource puis-je encore trouver ?
CIUTA.— Je vous conseille d’abord de sortir d’ici, car voici son mari qui la suit.
Ils sortent. - Entrent Claudio et Tibia.
CLAUDIO.— Es-tu mon fidèle serviteur, mon valet de chambre dévoué ? Apprends que j’ai à me venger d’un outrage.
TIBIA.— Vous, Monsieur ?
CLAUDIO.— Moi-même, puisque ces impudentes guitares ne cessent de murmurer sous les fenêtres de ma femme. Mais, patience ! Tout n’est pas fini. - Écoute un peu de ce côté-ci : voilà du monde qui pourrait nous entendre. Tu m’iras chercher ce soir le spadassin que je t’ai dit.
TIBIA.— Pour quoi faire ?
CLAUDIO.— Je crois que Marianne a des amants.
TIBIA.— Vous croyez, Monsieur ?
CLAUDIO.— Oui ; il y