Les liens entre la connaissance scientifique et la responsabilité civile : preuve et conditions de la responsabilité civile
Etienne Vergès Professeur à l’Université de Grenoble Membre de l’institut Universitaire de France
Le droit de la responsabilité est imprégné de raisonnement scientifique. L’objet de la présente contribution vise à montrer, non seulement, de quelle façon la connaissance scientifique influe sur le mécanisme de la responsabilité, à travers l’examen de ses conditions, mais encore, comment cette connaissance scientifique permet d’établir la preuve des conditions de la responsabilité civile. En filigrane de cette démonstration, se pose la question de savoir, dans quelle mesure la responsabilité civile constitue le pur produit d’un raisonnement automatisé au regard de données scientifiques ou, au contraire, dans quelle mesure la décision sur la responsabilité civile demeure un syllogisme juridique qui fait intervenir l’acte de volonté.
D’un point de vue juridique, on enseigne traditionnellement que la responsabilité civile repose sur la réunion de trois conditions : le fait générateur (FG), le dommage (D) et le lien de causalité (LC) entre ces deux premières conditions. Une première tentation serait donc d’établir une équation de la responsabilité civile sous la forme d’une somme1 :
FG+D+LC = -D (responsabilité)
L’addition des trois conditions produit l’indemnisation. Cette indemnisation constitue la réparation du dommage. Il est ainsi possible de la symboliser par le signe “–D”. Comme mécanisme de retour au statu quo ante, l’indemnisation doit permettre d’effacer, même fictivement, le dommage. L’indemnité accordée à la victime, en nature ou par équivalent, constitue donc l’image inversée du dommage, ou plus précisément l’opposée du dommage. C’est pour cette raison que l’on peut procéder à la symbolisation suivante