Les particules élémentaires
Les particules élémentaires de Michel Houellebecq[i]
Lors de sa sortie en 1998, le deuxième roman de Michel Houellebecq, Les particules élémentaires, a été l’événement de la saison en France, à la fois sur le plan publicitaire (ce fut un grand succès de librairie) et sur le plan critique. En effet, le roman fut abondamment commenté, provoquant des réactions contrastées, allant de l’éloge dithyrambique à la haine, certains commentateurs accusant l’auteur de racisme, sinon d’eugénisme[1]. Cet article voudrait, en quelque sorte, répondre à ces commentaires négatifs qui proposaient une lecture au premier degré et strictement morale du roman. On a voulu voir dans Les particules élémentaires un roman «engagé», parfois à droite et parfois à gauche (les propos souvent ambigus de l’auteur n’ont pas aidé à clarifier les choses, tant il est vrai que, malgré «la mort de l’auteur» proclamée par Barthes et d’autres, on tend encore souvent, dans les journaux, à associer l’auteur d’un roman aux propos de son narrateur.) J’aimerais au cours des prochaines pages proposer une lecture morale du roman, liée à une réflexion sur la science aujourd’hui, alors que l’auteur déplace, permet de voir autrement (de manière fantasmatique) certains enjeux scientifiques contemporains qui sont au cœur du discours social. Sans imposer d’interprétation particulière, Houellebecq conduit au bout de sa logique une lecture possible de certaines recherches scientifiques actuelles qui posent des problèmes éthiques. Il n’est pas incongru de lier cette lecture à ce qu’on pourrait nommer un «imaginaire de la fin», alors que la parution du roman coïncidait avec la parution d’une pléthore d’articles et d’analyses portant sur les effets du passage prochain d’un millénaire à un autre.
¤¤¤
Les particules élémentaires, roman axé sur une isotopie de la mort, raconte l’histoire alternée de deux demi-frères, Bruno et Michel, nés à la fin des années