Les pauvres ont-ils le droit de voler les riches en cas d'absolue nécessité ?
Introduction
Au 13e siècle, Pierre de Blois, archidiacre de Bath, donne l’exemple d’un homme très pauvre torturé par la faim et la nudité. Sous ses yeux, sa femme et sa famille vont mourir d’inanition ; à moins qu’il ne dérobe de quoi manger, ils sont tous voués à une mort imminente. Il se résout donc à voler un bien de peu de valeur, choisissant de risquer sa vie plutôt que de subir l’insupportable torture de la faim. Mais le pauvre homme est pris sur le fait, puis condamné à mort.
Que penser d’une telle sévérité ? N’aurait-on pas du accorder des circonstances atténuantes à cet homme au regard de la situation d’extrême détresse dans laquelle il se trouvait ? En d’autres termes, cet homme que la faim a contraint à voler aurait-il pu être reconnu innocent de ce crime ?
L’on peut aller plus loin en se demandant si, au delà de la faim, il est permis à un homme de sauver sa vie en prenant le bien d’autrui, c’est-à-dire en volant à plus riche que lui ?
Se pose alors la question de la responsabilité. Il s’agit non seulement de savoir si le voleur doit être soumis à une peine canonique pour avoir brisé le sixième commandement « Tu ne voleras pas », mais également de réfléchir à une possible responsabilité criminelle et civile du prévenu, puisque l’on a dérobé quelque chose à un propriétaire et donc enfreint l’article 379 du Code Pénal : « quiconque à soustrait frauduleusement une chose qui ne lui appartient pas est coupable de vol ».
Cette question qui fait débat dans les milieux scolaires, éthiques, théologiens, canonistes et légistes rentre dans une réflexion plus globale de Gilles Couvreur sur les devoirs des Etats riches envers les pays sous-développés et « le problème des rapports entre le superflu des uns et la faim des autres ». * Nous allons donc étudier les arguments de chacun d’entre eux afin d’essayer de trouver une réponse satisfaisante. Nous nous