Les récits de la création - apocalypses romantiques
Les œuvres étudiées constituent des relectures de l’Apocalypse, il semble donc à première vue paradoxal de s’interroger sur leur caractère génésiaque. Pourtant, si le récit de Jean est bien celui de la destruction du monde (apparition des quatre cavaliers, tremblement de terre, soleil noir, grêle, feu, fléaux…) ; il s’achève sur la Jérusalem céleste, promesse d’une félicité à venir pour les Nations. Ainsi, la destruction apparaît ici comme un préalable à toute création future. Les quatre textes au programme proposent des récits de la création très différents, en traduisant par là différentes conceptions. Les différents « modes de création » exprimés associent Apocalypse et Genèse, destruction et construction, chute et rédemption ; dans une vision qui se fait alors cyclique. La question de la création traduit donc des préoccupations métaphysiques (qui est le créateur ? est-ce Dieu ?).
Avant d’être des récits de la création, les différents textes présentent des épisodes apocalyptiques. La situation initiale est celle d’un chaos le plus absolu, donnant aux œuvres une dimension eschatologique. Cette impression de néant, de désordre traduit l’état du monde extérieur. Ainsi, dans Les Châtiments, Hugo présente une France oppressée par la tyrannie du Second Empire. Au tout début du recueil, dans le poème Au moment de rentrer en France, Hugo ne s’écrie-t-il pas, en s’adressant à son pays « Aujourd’hui que le monde autour de toi s’écroule, me voilà » ? Il évoque « l’aurore noire du plus fort », le sang ruisselant, les toits en feu et les aigles noirs. De même, dans Nox, la description du coup d’état du 2 décembre 1851 est terrifiante, Napoléon III est comparé à un « monstre noir », le champ lexical de la violence est omniprésent « Qu’on les égorge ; frappez !, tuez !, mitraillez moi toute cette canaille !, feu !, Que le sang sur les boulevards coule en rivières ! ». Même l’innocence et la pureté de