Les sonnets du 16è siecle
Qui d’un poëte entend suivre la trace En traduisant, et proprement rimer, Ainsi qu’il faut la diction limer, Et du françois garder la bonne grace,
Par un moyen luy conviendra qu’il face Egale au vif la peinture estimer L’art en tous pointz la Nature exprimer Et d’un corps naistre un corps de mesme face:
Mais par sus tout met son honneur en gage, Et de grand’peine emporte peu d’estime Qui fait parler Petrarque autre langage,
Le translatant en vers rime pour rime: Que pleust aux Dieux et Muses consentir Qu’il en vinst un qui me peust dementir. (J. Peletier du Mans, Oeuvres poétiques, 1547) *
Chi vuol veder: Qui vouldra veoir tout ce que peult Nature, Contempler vienne une qui en tous lieux Est ung soleil, ung soleil à mes yeulx, Voire aux ruraulx qui de vertu n’ont cure.
En vienne tost, car mort prent (tant est dure) Premier les bons, laissant les vicieux, Puis ceste cy s’en va du reng des dieux: Chose mortelle et belle bien peu dure
S’il vient à temps, verra toute beauté, Toute vertu et meurs de royalté Joinctz en ung corps par merveilles secret:
Alors dira que muette est ma ryme, Et que clarté trop grande me supprime: Mais si trops tarde aura tousjours regret. (C. Marot, Six sonnets de Pétrarque, s. 2, 1539) *
Qui veut savoir en quantes et quelle sorte Amour cruel travaille les esprits De ceux, qui sont de son ardeur espris Et, le servant, quel fruit on en rapporte:
Qu’il vienne voir ma peine ardente et forte, En discourant ces mienx piteux escrits, Car mes helas, et mes soupirants cris Descouvriront la douleur, que je porte.
Il me verra