Les Tragiques, Agrippa d'Aubigné
I. Un combat fratricide
a) De l’union à l’opposition
Nous verrons comment Agrippa d’Aubigné se livre à une critique des guerres de religion à travers un tableau allégorique doté d’un souffle épique ainsi que d’une tonalité tragique.
Au début du poème, les deux frères sont mentionnés ensemble pour souligner leur lien « de deux enfants chargés » vers 2, par la suite il sont évoqués séparément « Le plus fort » vers 3 fait usage d’un superlatif pour Esaü, « Ce voleur acharné, cet Esaü malheureux » métaphore vers 7, « Mais son Jacob, pressé » vers 11. Nous remarquons également, que les champs lexicaux de la violence et de la mort sont employés, « empoigne les deux bouts des tétins nourriciers » métaphore vers 3-4, « à force de coup d’ongles, de poings, de pieds » gradation sur l’agression physique envers la mère vers 5, « pour arracher à son frère la vie » hyperbole vers 9, « ni les soupirs ardents, les pitoyables cris, ni les pleurs réchauffés » énumération de termes de registre pathétique vers 15-16, « leurs coups se redouble » vers 18.
b) Injustice et parti pris, l’importance de la référence biblique
L’auteur prend clairement parti pour Jacob dés le début bien qu’il le décrive comme plus faible qu’Esaü qui est « Le plus fort, orgueilleux » vers 3. Les dernières vers sont glaçant « Vous avez félons, ensanglanté le sein qui vous nourrit et qui vous a porté ; or, vivez de venin, sanglante géniture, je n’ai plus que du sang pour votre nourriture. ». Cette citation est transcrite au discours directe ce qui, avec l’emploi de l’impératif « vivez de venin », amplifie son effet prophétique et rend la menace plus réelle. L’issue est funeste autant pour la mère que pour Jacob et Esaü L’appellation péjorative « félons » est destinés aux deux frères ainsi ils sont réunis et sont tous deux aussi fautif l’un que l’autre de la lente agonie de la mère.